Soudan: la principale base navale visée par une nouvelle attaque de drone
Une attaque de drone a visé la principale base navale du Soudan mercredi, a indiqué une source militaire à l'AFP, après des frappes sur d'autres sites stratégiques de Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement soudanais.
Depuis avril 2023, ce pays d'Afrique de l'Est est dévasté par une guerre opposant le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays depuis un coup d'Etat en 2021, et son ancien adjoint, le général Mohamed Hamdane Daglo, à la tête des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).
Longtemps épargnée, la ville de Port-Soudan (est), plaque tournante de l'aide humanitaire qui abrite des agences de l'ONU et des milliers de déplacés, est depuis dimanche la cible de frappes que l'armée attribue aux FSR avec des "armes stratégiques et sophistiquées" fournies par les Emirats Arabes Unis.
Mercredi matin, des drones "ont attaqué la base Flamingo et les missiles anti-aériens sont entrés en action", a indiqué la source militaire sous couvert d'anonymat.
A l'aube, un correspondant de l'AFP a entendu une série d'explosions dans la zone du port et vu une colonne de fumée s'élever du secteur de la base.
La veille, des frappes également attribuées par l'armée aux FSR avaient endommagé des infrastructures stratégiques, notamment l'aéroport civil, le dernier encore opérationnel dans le pays, une base militaire, une station électrique et des dépôts de carburant à Port-Soudan, principal port du pays.
Depuis la fin avril, la ville d'Atbara, capitale de l'État du Nil, souffre d'une panne de courant majeure après une attaque de drone ayant endommagé la centrale électrique, "perturbant gravement l'approvisionnement en oxygène dans les hôpitaux locaux", selon Médecins Sans Frontières (MSF).
"Les attaques contre les infrastructures critiques, telles que les centrales électriques, ont un impact dévastateur sur la santé des communautés locales et limitent gravement la capacité d'un système de santé déjà surchargé", a déclaré Marta Cazorla, coordinatrice des urgences de MSF au Soudan.
- "Lien vital" -
A près de 600 kilomètres plus au sud, "trois drones ont tenté de frapper des installations aéroportuaires" à Kassala, ville tenue par l'armée, près de la frontière avec l'Erythrée, a rapporté mercredi une source sécuritaire.
Les frappes font craindre une interruption de l'aide humanitaire au Soudan, où la famine a déjà été déclarée dans certaines régions et où près de 25 millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire grave.
Tom Fletcher, responsable des secours de l'ONU, s'est déclaré "très préoccupé" par les frappes de drones sur Port-Soudan, "point d'entrée clé pour l'aide" humanitaire.
L'ONU redoute de voir s'aggraver "les souffrances humaines dans ce qui est déjà la plus grande crise humanitaire au monde".
La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts et déraciné 13 millions de personnes.
- Des drones "disponibles que dans certains pays" -
L'attaque de mercredi survient au lendemain de la rupture par le Soudan de ses relations diplomatiques avec les Emirats arabes unis, accusés par Khartoum d'équiper les FSR.
Abou Dhabi a toujours nié ces accusations, malgré des rapports d'experts de l'ONU, de responsables politiques américains et d'organisations internationales.
Les drones utilisés lors des récentes attaques "ne sont disponibles que dans certains pays" et les autorités "disposent d’informations documentées sur la nature et l'origine de ces armes, qui seront rendues publiques en temps voulu", a affirmé mercredi le ministère soudanais des Affaires étrangères.
Après avoir perdu plusieurs positions dont la capitale Khartoum en mars, les FSR, privées d'aviation, recourent davantage aux drones déployés depuis leurs bases dans la région du Darfour, à quelque 1.500 kilomètres à l'ouest de Port-Soudan. Le but est de couper les approvisionnements de l'armée, selon des experts.
L’Egypte voisine, elle aussi dirigée par un pouvoir militaire, reste le principal soutien de l’armée soudanaise et exerce, selon des experts, une influence notable sur le général al-Burhane.
Le chef de l'armée s'est également rapproché de la Turquie et de l'Iran, qui lui auraient fourni des drones, contribuant à inverser le cours de la guerre ces derniers mois.
La Russie, qui soutenait auparavant les FSR par le biais de son groupe de mercenaires Wagner, a désormais rejoint le camp de l'armée, cherchant à obtenir une base navale sur la mer Rouge près de Port-Soudan.
R.Campbell--PI